Résumé :
Dans un quartier préservé d’Abadan, Clarisse, l’épouse et mère de famille à travers qui l’histoire se déploie, est une femme d’une profonde humanité, intelligente, d’une simplicité de cœur qui nous la rend spontanément attachante. Par ses yeux, on observe le petit cercle qui se presse autour du foyer : un mari ingénieur à la raffinerie, fervent de jeu d’échecs et de politique, les deux filles, adorables et malicieuses jumelles, Armène, le fils vénéré en pleine crise d’adolescence, et la vieille mère enfin qui règne sur la mémoire familiale.
Pourtant la très modeste Clarisse, cuisinière éprouvée qui se dévoue sans compter pour les siens, va bientôt révéler sa nature de personnage tchekhovien, au romanesque d’autant plus désarmant qu’il se montre on ne peut plus retenu. De nouveaux voisins se manifestent en effet, une famille arménienne débarquée de Téhéran qui va très vite bouleverser l’équilibre affectif de notre femme invisible.
L’auteur :
Romancière, nouvelliste hors pair, Zoyâ Pirzâd, née à Abadan d’un père iranien d’origine russe et d’une mère arménienne, fait partie de ces auteurs iraniens majeurs qui ouvrent sur le monde l’écriture persane sans rien céder de leur singularité. Découverte par les éditions Zulma en 2007, elle a reçu en 2009, pour le « Goût âpre des kakis« , le Prix Courrier International du meilleur livre étranger. « C’est moi qui éteins les lumières« , immense succès en Iran, salué par de nombreux prix, dresse avec justesse et drôlerie le portrait d’une société patriarcale scellée par les usages et traditions des femmes.
Mon avis :
Une auteure que j’affectionne particulièrement. Cette histoire, son premier roman est superbe. Envoûtant et sensible, il retrace l’histoire d’une famille arménienne en Iran. Clarisse, l’héroïne, mère au foyer élève ses 3 enfants et s’occupe de sa maison. Bon petit soldat, elle veille au bienêtre de tous ses proches. Sa vie est partagée entre le rangement de sa maison, la cuisine et l’éducation des enfants : une parfaite femme au foyer. Son mari ingénieur, après le dîner et la télé le soir lui demande : c’est toi qui éteins les lumières ?
Les deux autres personnages proches de Clarisse sont sa mère, envahissante et autoritaire et sa sœur qui cherche l’homme idéal. A l’arrivée de nouveaux voisins, cette mécanique bien huilée va s’enrayer.
Le fils de Clarisse tombe amoureux de la petite voisine et Clarisse va s’intéresser au père de la petite voisine. Sa vie bouleversée, l’amène à se poser des questions sur sa vie, ses aspirations et donc à s’opposer à son mari. Un climat très bien rendu, des personnages attachants et une histoire tout en douceur .
Une auteure sensible qui nous dépeint si bien le quotidien de ses personnages qu’ils nous deviennent très proches.
J’ai vécu avec Clarisse et sa famille, partagé ses agacements vis à vis de son mari, sa mère et sa sœur , souri des mots de ses filles et réfléchi sur sa condition de femme.
Son investissement dans la vie de famille l’étouffe par moment. Pourquoi ne pense-t-on pas plus à moi ? Personne ne me demande ce que je pense ?
La littérature et l’amitié d’Emile l’aideront à se sentir exister mais c’est difficile pour une âme sensible et idéaliste comme Clarisse.
Un très beau livre que je recommande chaleureusement pour l’ambiance, l’écriture fluide et l’histoire.
Un grand merci aux éditions Zulma et à Libfly