Des pages et des îles

Le grand Cœur de Jean-Christophe Ruffin

Résumé :

Dans la chaleur d’une île grecque, un homme se cache pour échapper à ses poursuivants. Il évoque sa vie hors du commun et tente de démêler l’écheveau de son destin. Fils d’un modeste pelletier, il est devenu l’homme le plus riche de France. Il a permis à Charles VII de terminer la guerre de Cent Ans. Il a changé le regard sur l’Orient. Avec lui, l’Europe est passée du temps des croisades à celui de l’échange. Comme son palais à Bourges, château médiéval d’un côté et palais Renaissance de l’autre, c’est un être à deux faces. Aussi familier des rois et du pape que des plus humbles maisons, il a voyagé à travers tout le monde connu. Au faîte de sa gloire, il a vécu la chute, le dénuement, la torture avant de retrouver la liberté et la fortune. Parmi tous les attachements de sa vie, le plus bouleversant fut celui qui le lia à Agnès Sorel, la Dame de Beauté, première favorite royale de l’Histoire de France, disparue à vingt-huit ans. Son nom est Jacques Cœur. Il faut tout oublier de ce que l’on sait sur le Moyen Âge et plonger dans la fraîcheur de ce livre.

Biographie de l’auteur

Jean-Christophe Rufin, médecin. voyageur, écrivain, est l’auteur de romans désormais classiques, tels que I’Abyssin, Globalia ou Rouge Brésil, prix Goncourt 2001. Il est membre de l’Académie française depuis 2008.

Mon avis

A mi-chemin entre biographie et roman, une histoire qui enchante et se lit très vite,

Jacques Cœur le héros, a eu une vie hors du commun qui relève d’un roman d’aventure. Issu d’une famille de bourgeois, Jacques rêve de l’Orient dés son enfance. Destiné à devenir pelletier comme son père, son mariage et plus exactement son beau-père, le pousseront vers un autre destin : celui d’argentier du roi.

Comment y arrive-t-il, alors qu’il n’est pas noble et vit loin de la capitale ?

Ce qui fascine dans ce roman, c’est l’ascension de cet homme, jeune et petit bourgeois, qui a l’envie d’entreprendre et de faire du commerce partout en France puis jusqu’en Orient. Son idée : développer l’échange et prêter de l’argent aux acquéreurs des biens. Après tant d’années de guerre, les finances de l’état sont presque vides, les échanges commerciaux apporteront progressivement des richesses et maintiendront la paix.

Un héros du quatorzième siècle très moderne.

L’auteur parvient à le rendre proche de nous, les autres personnages sont attachants aussi.

Au cœur du livre : la puissance monarchique face au pouvoir de l’argent; l’arbitraire d’un roi tout puissant l’emportera-t-il sur l’amitié entre deux hommes de condition différente ?

Je prends toujours beaucoup de plaisir à la lecture des romans de Jean-Christophe Ruffin grâce à sa plume magnifique. C’est un grand conteur, captivant, sachant mettre son érudition au service de ses textes.

Incontournable, je vous recommande chaudement ce magnifique roman historique.

Spéciale dédicace pour Sophie. Merci de me l’avoir offert.

 

Notation :

Quatre murs de Kéthévane Davrichewy

Résumé :

Deux ans après une réunion dans la maison familiale, quatre frères et sœurs, auparavant très proches, se sont éloignés. Ils acceptent pourtant de se rencontrer dans la maison que l’aîné vient d’acheter en Grèce, le berceau familial. Ce voyage sera pour beaucoup l’occasion de revenir sur la complexité et l’ambivalence de leurs relations.

L’auteur :

Kéthévane Davrichewy est née à Paris dans une famille d’origine géorgienne. Après La Mer Noire (2010), elle a publié, toujours chez Sabine Wespieser éditeur, Les Séparées (2012), qui lui a valu une belle reconnaissance critique et publique. Elle a également écrit de nombreux livres pour la jeunesse à L’École des loisirs.

 

Mon avis :

Quatre murs, un titre qui évoque l’histoire de quatre frères et sœurs bousculés par la vente de leur maison familiale qui les a vus grandir.

Saul, Hélène et les jumeaux : Réna et Elias, racontent chacun à leur tour, leur vie. Comment se positionner dans cette fratrie dont les rapports se sont distendus avec les années ? Arrivés à l’âge adulte et devenus parents à leur tour, les liens qui les unissent avec leur mère n’ont pas forcément changés. Face à cette constatation, une question : comment vivre et se positionner dans cette fratrie ? Quelle attitude adopter lorsqu’ils se retrouvent, adultes et en même temps les enfants face à leur mère ? Le passé remonte, les non-dits, les secrets et les liens qui unissent les jumeaux. La maison joue un rôle important, ciment de cette famille en partie désunie à présent.

Quel beau texte, qui se déguste, se savoure et fait écho en chacun de nous.

Mélancolique et sensible, une belle histoire à découvrir.

Je vous le recommande chaleureusement.

Merci pour le conseil Mariam !

 

Notation :

Les douze tribus d’Hattie de Ayana Matthis

Résumé :

Gare de Philadelphie, 1923. La jeune Hattie arrive de Géorgie en compagnie de sa mère et de ses sœurs pour fuir le Sud rural et la ségrégation. Aspirant à une vie nouvelle, forte de l’énergie de ses seize ans, Hattie épouse August. Au fil des années, cinq fils, six filles et une petite-fille naîtront de ce mariage. Douze enfants, douze tribus qui égrèneront leur parcours au fil de l’histoire américaine du XXe siècle. Cette famille se dévoile peu à peu à travers l’existence de ces fils et de ces filles marqués chacun à leur manière par le fort tempérament d’Hattie, sa froide combativité et ses secrètes failles.

L’auteur :

Ayana Mathis a grandi dans les quartiers Nord de Philadelphie. Férue de poésie, elle suit plusieurs cursus universitaires sans en terminer aucun, travaille comme serveuse puis fact-checker dans divers magazines. En 2009, elle participe au programme de Creative writing de l’Université de l’Iowa sous la direction de Marilynne Robinson. Quelques mois plus tard, elle termine son premier roman, Les Douze Tribus d’Hattie. Elle vit et écrit à Brooklyn.

Mon avis :

Les douze tribus sont les onze enfants et une petite fille dont Hattie a pris soin.

Le personnage central, Hattie, est dépeint au travers de ses enfants. Jeune fille noire venue de Georgie en 1925 à quinze ans, elle rencontre son futur mari et très vite des jumeaux naissent. La vie est très difficile pour ce couple si jeune, un drame survient dès le premier chapitre. Le reste de sa vie sera marqué par cet événement.

L’auteure décrit la vie de ces noirs américains à différentes époques : dans les années 20, dans les années 40 puis en 80. L’arrivée à Philadelphie au début du vingtième siècle permet à ces noirs d’échapper au climat racial du sud des États-Unis. Les épreuves continuent dans les années suivantes.

Un très beau roman poignant avec un chapitre par enfant. La construction originale donne un rythme à cette histoire émouvante qui montre une mère très combative face à un mari défaillant et à sa tribu d’enfants. Loin d’être parfaite, le désir de survivre et d’élever ses enfants l’emportera toujours.

Impossible de rester insensible à l’histoire, on en ressort troublé.

Le style est très fluide, aucune longueur, des personnages forts, je comprends l’engouement outre-Atlantique pour ce récit.

Bravo et suivez mon conseil : lisez-le !

 

Notation :

L’an prochain à Grenade de Gérard de Cortanze

Résumé :

Grenade, 31 décembre 1066 : cinq mille Juifs sont massacrés en une nuit. Échappent à la tuerie la jeune Gâlâh et Halim, son ami. Mémoire vivante de son peuple, Gâlâh traverse les siècles. On la retrouve à Séville, à Tolède, à Lisbonne, à Oran, à Constantinople, à Venise, à Haarlem, à Tréblinka, à Sarajevo, à New York, à Grenade à nouveau, à Paris enfin, devant une école, un matin de septembre où un tueur l’attend.

L’auteur :

Auteur de soixante-dix livres traduits en vingt langues, dont Assam (prix Renaudot, 2002), Gérard de Cortanze est membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, et dirige la collection Folio biographies chez Gallimard.

Mon avis :

Fresque historique avec une dimension surnaturelle, cette histoire nous plonge au cœur des persécutions subies par les juifs sepharades.

L’héroïne, une jeune fille de quatorze ans, s’éprend d’un jeune musulman. En ces temps reculés, l’amour entre ces deux confessions religieuses est proscrit. L’émir de Grenade, qui gouverne la ville est musulman et lorsque la colère du peuple musulman gronde s’opposant aux juifs, l’émir laisse faire. Lors d’une nuit dramatique, tous les juifs sont massacrés. La jeune Gâlâh survit grâce à son amoureux. Leur épopée pour survivre ensemble continuera de rencontrer l’intolérance et le rejet de la part les chrétiens et des musulmans.

A la fois roman d’amour et livre historique, ce récit parfaitement documenté se lit facilement grâce à son style impeccable. Un bémol sur quelques longueurs qui m’ont gênée dans ma lecture.

Le personnage principal est attachant et l’histoire poignante.

La dimension philosophique a aussi retenu mon attention : cette haine entre ces croyances religieuses disparaîtra-t-elle un jour ? Quelle cohabitation possible pour ces peuples ?

A découvrir pour toutes ces raisons.

Merci Libfly et Albin Michel pour cette découverte dans le cadre du prix du roman historique de Levallois.

 

 

Le roi n’a pas sommeil de Cécile Coulon

Résumé :

Thomas Hogan aura pourtant tout fait pour exorciser ses démons ? les mêmes
qui torturaient déjà son père. Quand a-t-il basculé? Lorsque Paul l’a trahi pour rejoindre la bande de Calvin ? Lorsqu’il a découvert le Blue Budd, le poker et l’alcool de poire ? Lorsque Donna l’a entraîné naïvement derrière la scierie maudite ?

L’auteure : Cécile Coulon, a 23 ans, ce titre est déjà son quatrième livre, il a reçu le prix Mauvais genres 2012 décerné par France Culture et le Nouvel Observateur.

Mon avis :

Un Livre « coup de poing » qui marque.

Une histoire sombre à la limite du thriller, des personnages forts et un récit très tendu.

Le personnage principal Thomas est le fils de William, ouvrier alcoolique et de Mary une mère très attachée à son fils. William est dur, violent tout en aimant ses proches. Mary, quant à elle, adore son fils et le protège. La vie s’écoule tant bien que mal quand un accident vient tout bouleverser. A partir de là tout bascule, les caractères des personnages changent et une spirale infernale les entraine vers l’inexorable chute.

La sensation de malaise qui habite le récit à ce moment là, augmente la dimension réaliste de l’oeuvre.

Les personnages cabossés sont proches de ceux d’écrivains américains comme Steinbeck.

Le style concis et maitrisé impressionne le lecteur.

Un court récit pourtant riche en émotions, ce qui prouve qu’une grande histoire peut s’écrire en moins de 200 pages. Une performance !

Une belle découverte : merci aux Éditions Points et à sa sélection pour le meilleur roman 2014.

 

Notation :