Des pages et des îles

Le peintre d’éventail de Hubert Haddad

Résumé :

C’est au fin fond de la contrée d’Atôra, au nord-est de l’île de Honshu, que Matabei se retire pour échapper à la fureur du monde. Dans cet endroit perdu entre montagnes et Pacifique, se cache la paisible pension de Dame Hison dont Matabei apprend à connaître les habitués, tous personnages singuliers et fantasques.

Attenant à l’auberge se déploie un jardin hors du temps. Insensiblement, Matabei s’attache au vieux jardinier et découvre en lui un extraordinaire peintre d’éventail. Il devient le disciple dévoué de maître Osaki.

Mon avis :

Un grand texte sur le Japon superbement écrit. J’ai beaucoup aimé ce livre tant pour le dépaysement que pour la belle écriture imagée, ciselée et tout en finesse.

Beaucoup de poésie et d’émotion traversent toute cette histoire merveilleuse.

Nous rencontrons trois personnages principaux reliés par les peintres d’éventails, d’où le titre.

Tout d’abord le maître Osaki, le peintre d’éventails, aussi créateur et metteur en scène du jardin, puis Matabei qui se lie avec le vieux maître et découvre son œuvre. Le personnage féminin principal est Dame Hison, la responsable de la pension, qui tisse des liens privilégiés avec Matabei et le vieux maître.

Ce roman est essentiellement l’histoire de la transmission de cet art si particulier de peinture sur éventails mais aussi de la création d’un jardin en accord avec la nature et les saisons. Un troisième personnage arrive, Hi-han, un jeune homme inculte et simple.

Le récit est rythmé par la voix de ces différents personnages qui s’expriment chacun à leur tour et semblent se répondre. Leurs destins vont se croiser et s’emmêler.

Une fabuleuse plongée au cœur du Japon grâce à ses descriptions de la nature et aux haïkus qui émaillent le roman. Un auteur japonais aurait-il pu faire mieux ?

Émerveillée par ce récit superbe, j’ai surtout été touchée par la magie des mots qui se prêtent si bien à l’ambiance japonaise. La nature, la peinture et les personnages, tout est magnifiquement raconté. Après un tel texte, mes mots me semblent si ternes !

A découvrir absolument donc.

Un grand merci aux éditions Folio pour ce magnifique roman. A mettre dans toutes les mains …

 

Notation :

Clandestines de Zoé Ferraris

Résumé :

Dans le désert, une tempête a mis au jour un terrifiant sanctuaire : dix-neuf cadavres de femmes asiatiques, nues, mains tranchées, ensevelies sous une dune depuis dix ans. Qui étaient-elles ? Pourquoi personne n’a jamais signalé leur disparition ? Et quel message dissimule l’étrange disposition de leurs corps ?

Mon avis :

Un faux polar ce livre mais un grand livre, le contexte policier est un prétexte à la description de la vue en Arabie Saoudite de nos jours. En tout cas, c’est comme ça que je le perçois et c’est ce qui m’a convaincue et intéressée. Pourquoi me direz-vous ?

Je me suis aperçue que je ne connaissais rien ou presque de ce pays. Ou bien juste un lointain souvenir livresque avec « Tintin au pays de l’or noir » : autant dire que je n’avais jamais lu avant d’histoire se déroulant dans ce pays.

Dès le départ, l’histoire de ces corps découverts dans le désert nous emmène dans un autre monde : celui d’un pays doté d’un pouvoir religieux ancré dans les traditions qui rejaillit sur le quotidien de tous et surtout sur celui des femmes.

Voici l’histoire ou plutôt quelques éléments uniquement, un polar se découvre à sa lecture. Les ingrédients du roman policiers sont tous là : des meurtres, des enquêteurs tenaces et intelligents, des pistes multiples, un vrai suspense.

Le tour de force réalisé ici est de mettre en avant une enquêtrice Katya particulièrement douée alors que dans ce pays les femmes ne jouent que des rôles subalternes.

Un autre personnage féminin est le spécialiste des tueurs en série du FBI : l’auteur s’est amusée à confronter une femme experte dans un monde régenté par la gent masculine. Les policiers sont mal à l’aise devant cette femme experte venue les aider.

Les autres personnages principaux comme Nayir le fiancé de Katya ou Ibahim responsable des recherches, aident Katya et la soutiennent dans une quête de la vérité souvent périlleuse.

Revenons à l’histoire, après la découverte des corps dans le désert, Ibrahim, enquêteur principal, s’interroge sur la signification de ces meurtres puisque près des corps des mains tranchées sont découvertes. Pourquoi ces femmes enterrées pour certaines depuis plus de 10 ans n’ont jamais été déclarées disparues ? Quel lien les unit ? Pourquoi cette mise en scène ?

Toutes les réponses à découvrir dans le roman qui se lit facilement, l’écriture est fluide, les situations s’enchainent et le suspense très prenant.

Remarquable par ces démonstrations des différences entre hommes et femmes mais aussi entre saoudiens et immigrés. Les immigrés travaillant à la place des saoudiennes qui sont très peu nombreuses à travailler.

Je ne connaissais pas cette auteure qui a déjà publié deux livres avant celui-ci.

Américaine, elle a épousé un saoudien et vécut quelque temps à Djeddah avec son mari et ses enfants. Elle vit actuellement à San Francisco.

Je vous conseille ce roman pour son intrigue et plus encore pour la découverte de l’Arabie Saoudite. Une belle découverte pour moi.

Je remercie Belfond, Abeline et les Chroniques de la rentrée littéraire.

Notation :

Le roman du mariage de Jeffrey Eugenides

Résumé et biographie de l’auteur :

A l’université de Brown, au début des années 1980, une fille et deux garçons découvrent avec exaltation la littérature, le sexe, Roland Barthes et les Talking Heads. Mitchell tombe sous le charme de Madeleine, qui lui préfère Leonard… Tel un personnage de Jane Austen, la jeune femme se retrouve au cœur d’un dilemme amoureux. Mais les temps ont bien changé depuis l’époque d’Orgueil et Préjugés…

Jeffrey Eugenides, né dans le Michigan en 1960, est l’auteur de Virgin Suicides, adapté au cinéma par Sofia Coppola, et de Middlesex, récompensé par le prix Pulitzer.

Mon avis :

Une femme et deux hommes au cœur du roman que la couverture illustre parfaitement.

Ce trio amoureux est dépeint avec beaucoup de réalisme et de subtilité.

Fresque sociale des années 80 débutant à l’université, là où nos trois héros se rencontrent et débutent leur vie amoureuse.

Madeleine jeune femme issue d’un milieu aisé, tombe sous le charme de Léonard. Mitchell lui tombe amoureux de Madeleine dès qu’il l’aperçoit. Et Léonard ? Pour lui, tout est compliqué : après une enfance malheureuse, il devient dépressif pendant ses études. Malgré son état, il remarque Madeleine et cherche à la conquérir. Tout est bien qui finit bien semble-t-il, mais non finalement, tout se complexifie avec la maladie de Léonard. La suite, je vous laisse la découvrir.

Ce texte est bien écrit et rempli de références littéraires, avec un bémol : l’ensemble du texte est déstructuré, les digressions nombreuses et retours dans le passé sont gênants dans la lecture.

Face à ce livre, je suis donc partagée : au départ, j’ai été emballée par l’histoire et le style de l’écriture puis je me suis ennuyée au cours de la deuxième partie et je me suis même forcée à le terminer.

Des personnages pas assez attachants, des longueurs et la construction du récit qui est déroutante. Un roman qui s’essouffle au bout de 200 pages.

Globalement une déception, surtout face aux critiques dithyrambiques de la presse, je m’attendais a découvrir un chef d’oeuvre.

Maintenant à vous de voir.

Merci aux éditions Points.

 

Notation :

Le murmure de l’ogre de Valentin Musso

Résumé :

Nice, 1922. Deux prostituées sont assassinées, le crâne rasé et le corps recouvert d’étranges symboles. Bientôt, ce sont des enfants qui disparaissent et qui sont retrouvés égorgés aux quatre coins de la ville dans une mise en scène macabre.

L’auteur :

Né en 1977, Valentin Musso est agrégé de lettres et enseigne la littérature dans les Alpes-Maritimes. Il est l’auteur de La Ronde des innocents (2010) et Les Cendres froides (2011). Le Murmure de l’Ogre est son troisième roman.

Le Murmure de l’Ogre a obtenu le Prix Sang d’encre des lycéens et Prix du polar historique.

Mon avis :

Thriller qui se déroule dans les années 20 à Nice.

L’histoire : la traque d’un meurtrier d’enfants que l’on suit au travers des personnages principaux : Louis Forestier et Frédéric Berthellon.

Louis Forestier est un « mobilard » de la première génération. Clemenceau a constitué dès 1907 un ensemble de Brigades Mobiles pour rechercher plus efficacement les criminels. Cette institution est l’ancêtre de la police judiciaire.

Frédéric Berthellon est médecin à l’hôpital Sainte-Anne, appelé à la rescousse par Louis son ami pour mettre au service de la brigade de Nice ses connaissances psychiatriques. Cajolé et Leroux deux autres mobilards, sont au cœur de l’action également. Raphaël, riche et aviateur à ses heures perdues participe aussi à cette fabuleuse enquête.

L’intrigue, je vous laisse la découvrir, mieux vaut ne pas trop en dire pour un polar.

L’ambiance et le contexte : la haute bourgeoisie sur la Riviera, les grandes fêtes mais aussi les immigrés italiens, la grande guerre et ses séquelles et les meetings aériens.

En parallèle de l’intrigue policière ce roman est une peinture sociale du début du vingtième siècle.

Très réussi, ce récit est une plongée dans l’histoire du début du siècle dernier et une formidable reconstitution historique.

Efficace et documenté, un bon moment de lecture alliant le plaisir de l’intrigue et l’intérêt historique.

Je vous le recommande chaudement.

Son nouveau roman vient de paraître « Sans faille » et sur les excellents conseils de mon libraire préféré il rejoindra prochainement ma pile de livres.

 

 

Notation :

La singulière tristesse du gâteau au citron d’Aimee Bender

L’auteur :

Née en 1969, Aimee Bender est une nouvelliste et romancière américaine. Elle vit à Los Angeles, où elle est professeur de « créative writing ». Elle est également l’auteur de L’Ombre de moi-même.

Résumé :

Le jour de ses 9 ans, Rose mord avec délice dans son gâteau d’anniversaire. S’ensuit une incroyable révélation : elle ressent précisément le mal-être éprouvé par sa mère en le préparant. Car, dans sa famille, chacun dispose d’un pouvoir unique, qu’il doit taire ; pour ces super-héros du quotidien, ce don est un fardeau. Comment supporter le monde quand la moindre bouchée provoque un séisme intérieur ?

Mon avis :

Un livre original sur la famille, l’enfance et plus particulièrement la relation mère fille.

Touchant, voici une fable originale qui enchante.

Doux comme un gâteau au citron, une belle chronique sur le destin d’une fillette qui possède un don très particulier : ressentir les émotions des personnes au travers de la nourriture qu’ils ont élaboré. Une providence ou une malédiction ?

Un peu les deux finalement, la fillette est perturbée et l’empathie la gagne. Surtout vis à vis de sa mère, comment l’aider quand celle-ci est abattue ?

Dans cette famille, le frère vivant dans un monde intérieur lié à son intelligence hors norme, seul le père est normal. Mais attention, il faut se méfier de l’eau qui dort !

Après quelques longueurs au début du récit, j’ai été emballée par ce texte sensible, tendre et loufoque. Une écriture fluide concourt au plaisir global.

Lancez-vous aussi et découvrez ce beau roman.

Merci aux éditions Points

 

Notation :