Auteur/autrice : <span>des Pages et des îles</span>

Profanes de Jeanne Benameur

profanes

Quatrième de couverture
Ancien chirurgien du cœur, il y a longtemps qu’Octave Lassalle ne sauve plus de vies. À quatre-vingt-dix ans, bien qu’il n’ait encore besoin de personne, Octave anticipe : il se compose une “équipe”. Comme autour d’une table d’opération – mais cette fois-ci, c’est sa propre peau qu’il sauve. Il organise le découpage de ses jours et de ses nuits en quatre temps, confiés à quatre “accompagnateurs” choisis avec soin. Chacun est porteur d’un élan de vie aussi fort que le sien, aussi fort retenu par des ombres et des blessures anciennes. Et chaque blessure est un écho.
Dans le geste ambitieux d’ouvrir le temps, cette improbable communauté tissée d’invisibles liens autour d’indicibles pertes acquiert, dans l’être ensemble, l’élan qu’il faut pour continuer. Et dans le frottement de sa vie à d’autres vies, l’ex-docteur Lassalle va trouver un chemin.

Mon avis :

Ce roman est un bijou.
C’est bouleversant tant la forme que le fond : ce roman ne peut nous laisser indifférent, tant d’émotions le traverse.

C’est l’histoire de rencontres entre un chirurgien et quatre personnages qui ne se connaissent pas et vont tous partager la vie du chirurgien.

Octave Lassalle est très âgé et souffre toujours de la disparition prématurée de sa fille unique morte à 20 ans. Comment se reconstruire après une telle perte ? Sa femme l’a quitté et les regrets l’assaillent. Pour conjurer cet état, il passe une petite annonce et demande à quatre personnes de veiller sur lui nuit et jour. Que cherche-il ? Du réconfort uniquement ? Sa démarche est plus compliquée et chaque personnage remplira une fonction particulière mais je n’en dirai pas plus.

Quel bonheur ce livre : à la fois une leçon de vie et un plaisir de lecture intense grâce à l’écriture magnifique et très poétique de l’auteur qui vient d’être couronnée du prix RTL 2013.
À découvrir sans tarder.

Extrait

Ils sont là, derrière la porte. Il ne faut pas que je rate mon entrée.
Maintenant que je les ai trouvés, tous les quatre, que je les ai rassemblés, il va falloir que je les réunisse. Réunir, ce n’est pas juste faire asseoir des gens dans la même pièce, un jour. C’est plus subtil. Il faut qu’entre eux se tisse quelque chose de fort.
Autour de moi, mais en dehors de moi. Moi qui n’ai jamais eu le don de réunir qui que ce soit, ni famille ni amis. A peine mon équipe à la clinique, parce qu’ils y mettaient du leur. Je leur en savais gré. Ce n’est pas la même affaire dans une clinique, les choses se font parce que sinon c’est la vie qui part. Ce n’est pas autour de moi qu’ils étaient réunis, c’était contre la mort. Et ça, c’est fort. Là, j’ai su tenir ma place.

Notation :

L’herbe des nuits de Patrick Modiano

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Mêlé de près à une affaire criminelle dans l’atmosphère trouble du Paris de la guerre d’Algérie, Jean rouvre une enquête classée sans suite et tente de mettre au clair les circonstances qui l’ont conduit à fréquenter la bande de l’Unic Hôtel et une certaine Dannie dont il était amoureux. En recoupant ses souvenirs avec les pièces d’un dossier de la brigade des moeurs, Jean, vraisemblablement le dernier témoin de cette affaire, explore au fil de ses déambulations nocturnes cet espace entrouvert où la mémoire rejoint l’oubli.

Extrait :« Mais je gardais mon sang-froid. Je m’étais souvent trouvé dans ce genre de situation, fuyant les gens que je connaissais, car j’éprouvais une fatigue soudaine à leur parler. Je changeais de trottoir à leur approche ou bien je me réfugiais dans l’entrée d’un immeuble en attendant leur passage. Il m’était même arrivé d’enjamber une fenêtre de rez-de-chaussée pour échapper à quelqu’un qui me rendait visite à l’improviste. Je connaissais beaucoup d’immeubles à double issue, dont une liste figure dans mon carnet noir ».

Un roman envoutant, avec des passages lugubres voire glauques et cette ambiance des sixties chère à l’auteur.

Le héros est écrivain et déambule dans les rues de Paris et se souvient de sa vie d’étudiant en compagnie de Dannie jeune femme mystérieuse. A la fois récit et en partie polar, nous suivons l’héroïne confrontée à des évènements suspects : qui est cette femme ? Qui sont les hommes qu’elle retrouve le soir dans l’hôtel où elle loge ? Un commissaire convoque d’ailleurs notre héros pour lui poser des questions sur tous ces personnages. La quête de Jean nous entraine dans un Paris des années 60 si différent d’aujourd’hui avec des descriptions de façade, de cafés.

C’est comme dans un film, je suis happée par l’écriture de Modiano qui me transporte et m’emporte à la fois dans ces années lointaines mais aussi me permet de partager la vie de ces héros. Une écriture élégante et envoutante qui nous livre une réflexion sur les conséquences des recherches sur son passé : attention aux fantômes qui surgissent.

Venez partager aussi la vie de Jean, Danny et les autres : vous ne serez pas déçu !

Plein de nostalgie et quelle écriture : à lire.

Notation :

L’homme joie de Christian Bobin

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J’ai rêvé d’un livre qu’on ouvrirait comme on pousse la grille d’un jardin abandonné.

Extraits: « Si mes phrases sourient, c’est parce qu’elles sortent du noir ».

«Je regarde le bleu du ciel. Il n’y a pas de porte. Ou bien elle est ouverte depuis toujours. Dans ce bleu, j’entends parfois un rire».

Christian Bobin, né le 24 avril 1951 au Creusot en Saône-et-Loire où il demeure, est un écrivain et poète français.

Ce livre est déroutant : à la fois lumineux, beau et fort mais aussi ennuyeux passé la moitié.

C’est un long poème dédié à la beauté de la vie, à sa femme disparue, à son père mais aussi notamment au peintre Soulages.

Composé de quinze récits, Christian Bobin nous raconte la simplicité de la vie et les beautés qui nous entourent comme les fleurs, les animaux, les peintures.

Mon sentiment : sur les premiers textes, j’étais emballée et transportée par la poésie du texte puis je me suis ennuyée et surtout j’ai moins apprécié les références au Christ.

Donc avis mitigé mais je lirai d’autres textes de cet auteur pour profiter de ses mots touchants de simplicité.

 

Notation :

La fille sur le coffre à bagages de John O’Hara

lafillesurlecoffreÀ New York, pendant la Prohibition, James Malloy, attaché de presse pour une société de production cinématographique, accompagne Charlotte Sears, actrice sur le déclin et maîtresse d’un riche homme d’affaires lié à la pègre. Au retour d’une réception, la star et son amant ont un accident de voiture… Ami d’Hemingway et de Fitzgerald, John O’Hara, qui fut surnommé par la critique « le Balzac américain », excelle dans le portrait désenchanté d’une société où l’on promène ses chagrins en limousine et en vison, en buvant du champagne…

 

Écrivain américain, John O’Hara (1905-1970) a quitté très tôt l’école et a exercé des métiers aussi divers que secrétaire, mécanicien, gardien de parc ou reporter… Auteur de romans, de scénarios et de nombreuses nouvelles, il a notamment écrit des feuilletons pour The New Yorker. Une de ses œuvres majeures est Rendez-vous à Samarra (1934). Sa vie mouvementée l’empêcha d’accéder à la reconnaissance critique qu’il méritait.

 

Futile, et décevant, je n’ai pas terminé ce livre.

L’histoire trop simple manque d’épaisseur, pas d’accroche non plus. C’est une succession de dialogue entre une comédienne et un journaliste.

Pas d’intrigue et je me suis ennuyée donc je ne vous le conseille pas.

J’ai préféré le roman «Rien n’est trop beau » de Rona Jaffe qui dépeint si bien la société américaine des années 50 (voir le commentaire publié sur ce site).

Vivement le prochain livre pour retrouver mon enthousiasme habituel.

Notation :

Mississipi d’Hillary Jordan

 mississipi_Un amour interdit, une terrible trahison, une agression d’une sauvagerie inouïe dans le Mississippi des années 1940. Dans la lignée d’un Faulkner, un roman d’une puissance étonnante qui nous plonge dans la brutalité et les contradictions du Vieux Sud. Lorsqu’elle découvre la ferme que son mari, Henry, vient d’acquérir, Laura McAllan comprend qu’elle n’y sera jamais heureuse. Pourtant, en épouse et mère dévouée, elle s’efforce d’élever leurs deux fillettes, sous l’oeil haineux de son beau-père, membre du Ku Klux Klan. Alors que les McAllan luttent pour tirer profit d’une terre peu fertile, deux soldats rentrent du front : Jamie, le jeune frère d’Henry, aussi séduisant et sensible que son aîné est taciturne et renfermé. Et soudain, Laura se sent renaître… Ronsel Jackson, le fils des métayers, un descendant d’esclaves qui, pendant quatre ans, s’est permis de croire qu’il était un homme. Mais le Sud va se charger de lui rappeler qu’il n’est qu’un nègre…

 

C est un premier roman qui se dévore.
Nous sommes plongés dans l’Amérique des années 40 avec des personnages puissants, rudes et émouvants
D’un côté les blancs propriétaires de la ferme et de l’autre les noirs métayers au service des blancs. Laura l’épouse du propriétaire est parachutée dans cet endroit isolé du Mississipi et alors sa vie bascule. À Memphis, Laura vivait en ville et dans une maison confortable alors que dans cette ferme, elle est isolée et surtout n’a aucune commodité à l’intérieur – pas d’eau courante et pas de toilettes – la vie est bien rude dans cet endroit isolé.
Les différents personnages s’expriment tour à tour et nous dépeignent leur vie : Florence la femme noire, sage-femme et bonne à tout faire de Laura, Henry le mari de Laura, Hap le métayer, Ronsel le fils aîné des métayers et enfin Jamie le jeune frère de Henry juste revenu de la guerre.
Ce roman choral raconte la dureté de la vie dans le Mississipi en 40, le racisme et aussi les ravages de la deuxième guerre mondiale.
Une fois entamé j’ai eu du mal à lâcher ce livre à la fois bouleversant et plein de suspense, je vous le recommande.

Hillary Jordan vient de publier son deuxième roman « Ecarlate », un pamphlet contre les dérives sectaires d’une société américaine puritaine et intolérante.

Notation :