Auteur/autrice : <span>des Pages et des îles</span>

Les fuyants d’Arnaud Dudeck

les fuyantsL’auteur :

Arnaud Dudek, né à Nancy en 1979, est un garçon discret.
Il a fait ses classes dans des revues littéraires, notamment Les Refusés et Décapage.

Son premier roman, Rester Sage (janvier 2012, Alma éditeur) a fait partie de la sélection finale du Goncourt du premier roman et du prix Méditerranée des lycéens. Le second, Les fuyants (août 2013, Alma éditeur), est sélectionné pour le prix des lycéens et apprentis de Bourgogne, et figure dans la sélection des trente romans de la rentrée littéraire FNAC. Titulaire d’une maîtrise en droit des affaires, il travaille à l’université de Bourgogne.

 

 

Bibliographie :
Copenhague, nouvelles, Éditions Filaplomb, 2007
– Les vies imperméables, nouvelles, StoryLab Éditeur, 2011
– Rester sage, roman, Alma Éditeur, 2012
– Les Fuyants, roman, Alma Éditeur, 2013

Un vrai plaisir ce livre, court mais dense, plein d’humour, de tendresse et d’émotion. Un récit sur la filiation et la position de l’homme dans la famille. La dédicace de Bernard Pivot sur la couverture donne le ton immédiatement : « Arnaud Dudek a le talent de raconter les malheurs de la vie avec des bonheurs d’écriture ». Déjà on est tentés par cette dédicace, moi je l’ai été.

Dans la famille Hintel quatre hommes décident d’en découdre avec la filiation. Mais l’herbe est-elle vraiment plus verte ailleurs ? Une tragi-comédie tendre et rosse, désopilante à souhait, construite comme un Rubik’s cube. Jacob, David, Simon et Joseph Hintel n’ont pas vraiment l’esprit de famille chevillé au corps. Les uns après les autres, ils s’évaporent. Adieu famille, moquette et vieillesse : la vie, même ordinaire, est ailleurs. Courage, partons. Les trois premiers fuyants connaîtront des fortunes diverses : Jacob pose ses valises au pays de l’ennui (sidéral), David choisit les contrées éternelles (il avale un insecticide), Simon part en quête de sagesse à marche forcée (en devenant oncle actif à défaut d’être mari ad hoc). Seul le petit dernier, Joseph, hacker farouchement marxiste et amoureux transi, brise la ligne.Après Rester sage, retenu dans la sélection finale du Goncourt 2012 du premier roman et traduit aux Pays-Bas, Arnaud Dudek propose une nouvelle tragi-comédie. Ici, les personnages voudraient ne pas rester sages mais le demeurent, malgré eux. Enlevée, savamment organisée, sa mini-saga familiale, écrite en phrases courtes qui font mouche, file les chagrins et les drames de la filiation d’une voix rieuse et parfois narquoise. – See more at: http://www.despagesetdesiles.fr/lectures-du-moment-3/#sthash.0tld2YWf.dpuf

Les rentrées littéraires se suivent et ne se ressemblent pas forcément et cette année, d’autres romans abordent ce thème de la fuite, notamment cet autre texte « Les évaporés ».

Pourquoi tout quitter ? Pourquoi refuser son quotidien et chercher ailleurs ce que l’on a perdu ? Est-ce de la lâcheté ou plutôt du courage : oser tout quitter et recommencer une nouvelle vie

Les fuyants aborde ces différents thèmes avec finesse, sensibilité plus un soupçon d’optimisme.

Les protagonistes sont Joseph, le plus jeune, David son père, Jacob le grand-père de Joseph et Simon son oncle. Ces quatre hommes d’une même famille, ont tous décidé de fuir quelque chose : femme, enfant, routine. Pourquoi cet acharnement à s’enfuir et se cacher ?

La narration alterne entre les quatre protagonistes, ce qui donne du rythme au récit. Ces hommes ordinaires qui survivent et tentent de s’adapter à leur quotidien cherchent tous leur place.

Ce qui m’impressionne le plus suite à cette lecture, c’est le contenu riche dans un texte si court. Le style est fluide, concis et en même temps tout y est : une histoire sur plusieurs générations, une réflexion sur la place de chacun de ces hommes, l’hérédité, la fatalité et le sens de la vie.

Mon personnage préféré est Jacob dès le début du livre, voici d’ailleurs, un extrait issu du premier chapitre le concernant : « le principal accouchera d’un discours aussi fatiguant qu’une naissance de triplés ». Jacob est simple c’est-à dire sans hobby, sans ami, sans femme et il n’aime rien sauf son whisky;  sa vie va basculer quand il apprend que l’heure de la retraite à sonné. Que va-il devenir ? En discuter avec un psychothérapeute ? Rechercher ceux qu’il a laissé derrière lui après  sa fuite ?

David est présenté au travers du journal de Joseph et beaucoup de mystère l’entoure.

Simon, lui, se débat entre une jeune amante, sa sœur Esther et son neveu Joseph qu’il cherche à aider. Joseph, le plus jeune, veut comprendre pourquoi son père et son grand-père ont décidé de tout plaquer.

Un véritable tour de force de réunir toutes ces histoires en si peu de pages.

Un roman que je n’ai quitté qu’à regret et que j’ai lu très vite. Alors que tant de livres proposent des histoires moins riches sur plus de 300 ou 400 pages, ici l’histoire tient en 100 pages très efficaces. Jamais de sentiment d’ennui ou lassitude. Bravo. Les trois dernières pages où l’auteur s’exprime sont remarquables.

J’aime beaucoup l’objet livre : beau papier, couverture sobre, et ses couleurs beiges et oranges. L’oiseau, emblème de la l’éditeur, échassier orange, décore la tranche et les couvertures. C’est vraiment un bel objet.

Je souhaite un bel avenir à cet auteur et Alma éditeur.

Je vais dorénavant suivre cet auteur mais aussi me pencher sur les autres titres de cette jeune maison d’édition.

Merci Chroniques de la rentrée littéraire pour cette découverte.chroniques-de-la-rentr-litt

 

Notation :

Esprit d’hiver de Laura Kasischke

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Quatrième de couverture
Réveillée tard le matin de Noël, Holly se voit assaillie par un sentiment d’angoisse inexplicable. Rien n’est plus comme avant. Le blizzard s’est levé, les invités se décommandent pour le déjeuner traditionnel. Holly se retrouve seule avec sa fille Tatiana, habituellement affectueuse, mais dont le comportement se révèle de plus en plus étrange et inquiétant…

 

Citation : « Douce et inquiétante, experte en malaise phosphorescent et ouaté, de livre en livre, elle a su bâtir un univers sans pareil, suspendu dans la rêverie aveuglante qui précède toujours le drame, ce moment de flottement où la clairvoyance se débat pour se faire entendre. »
Marine Landrot, Télérama

 

 

Mon avis : Un de mes auteurs fétiches raconte l’histoire d’une fille adoptive et de sa mère dans un huit-clos glaçant.

 

Tout est froid : le temps en ce matin de Noël et les relations entre cette adolescente de 13 ans et sa mère adoptive. La tension et le mystère sont palpables dès les premières pages;  les événements s’enchaînent alors que Holly, la mère, tente de rétablir le dialogue avec sa fille qui se dérobe . Les flashbacks nous apprennent comment Holly et son mari sont partis récupérer un beau bébé en Sibérie. Deux voyages ont été nécessaires, le premier pour choisir le bébé puis le second pour la ramener aux États Unis : quel bonheur pour ces nouveaux parents l’adoption de cette petite fille aux cheveux très noirs et aux grands yeux et quelle émotion aussi pour Holly lorsqu’elle repense à tous ces moments.

 

La tension monte en même temps que le blizzard s’intensifie : tout est exacerbé, le sentiment d’angoisse de Holly face à l’attente des invites pour le repas de Noël et les relations tendues entre mère et fille.

 

Tout est fort dans ce livre : le rythme, le style et lhistoire. Le plus impressionnant : la chute, mais je n’en dirai pas plus.

 

J’ai découvert Laura Kasischke avec « les revenants », la critique est aussi sur mon blog, j’étais déjà enthousiaste; ce livre confirme mon engouement pour elle.

A lire absolument. Un de mes coups de cœur de cette rentrée littéraire.

 

Notation :

Une femme dangereuse de Jerôme Prieur

Quatrième de couverture :
Tuer quelqu’un, c’est moins simple qu’on ne croit. Surtout quand cela ne vous est jamais arrivé. Et puis tuer une femme, je ne me serais pas douté que c’était plus difficile à faire qu’à imaginer.

Avant de me débarrasser d’elle, il fallait déjà que je la retrouve. Elle avait disparu, elle s’appelait Madeleine. J’avais trois jours devant moi, trois jours et trois nuits pour remonter le temps. Je marcherais sur ses pas, je guetterais son ombre. Je n’aurais qu’à suivre les traces qu’elle avait dû semer. Ne passons-nous pas chacun nos vies à en faire autant ?
J’étais prêt à voir ce que ses yeux avaient vu, à sentir son souffle, à toucher son empreinte. Je fouillerais sa vie, je remuerais ses souvenirs, j’aimerais ses amies. Elles me mèneraient jusqu’à elle, j’en étais sûr. J’étais prêt à courir le risque que mon passé m’explose au visage.

 

une-femme-dangereusBiographie : 

Jérôme Prieur est un écrivain et cinéaste français né en 1951 à Paris.
Après des études supérieures de lettres et de droit, il collabore à diverses revues littéraires, dont Les Cahiers du Chemin et Obliques, puis il tient la chronique cinéma de La Nouvelle Revue Française (1976-1983).  Depuis son premier livre paru en 1980, ses essais et ses textes en prose tournent beaucoup autour de la question de l’image. Quant à ses films, tous documentaires, c’est essentiellement la littérature, les arts et l’histoire qu’ils explorent.

 

Mon avis

Ce roman pourrait s’intituler : à la recherche de Madeleine.

Une histoire rocambolesque où notre héros doit tuer quelqu’un pour remercier celle qui l’a sauvé de la noyade. Il sait peu de choses sur celle qu’il doit supprimer : son prénom et une adresse uniquement.

Avant de découvrir Madeleine, le héros va croiser divers personnages qui la connaissent. Ces rencontres sont des mini histoires qui découpent le récit.

C’est un roman déroutant à la fois décalé et étonnant. Au début du livre, je suis entrée facilement dans l’histoire puis le rythme s’est ralenti, la lecture devenait moins intéressante et j’ai trouvé le tout décousu. Le rythme reprend simplement sur le dernier quart du livre.

Le héros m’a fait penser à Antoine Doinel le héros des films de François Truffaut : trop intéressé par les femmes, toujours à courir après et assez naïf.

Globalement, ce livre n’est pas assez captivant, manque d’étoffe – comme le personnage- et devient difficile à suivre par moment.

Ce n’est pas mon roman préféré dans cette rentrée littéraire.

 

Merci Libfly avec La voix des Indés et l’éditeur Le Passage pour cette lecture.

Notation :

Pietra Viva de Léonor de Récondo

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Quatrième de couverture
Michelangelo, en ce printemps 1505, quitte Rome bouleversé. Il vient de découvrir sans vie le corps d’Andrea, le jeune moine dont la beauté lumineuse le fascinait. Il part choisir à Carrare les marbres du tombeau que le pape Jules II lui a commandé. Pendant six mois, cet artiste de trente ans déjà, à qui sa pietà a valu gloire et renommée, va vivre au rythme de la carrière, sélectionnant les meilleurs blocs, les négociant, organisant leur transport. Sa capacité à discerner la moindre veine dans la montagne a tôt fait de lui gagner la confiance des tailleurs de pierre.
Lors de ses soirées solitaires à l’auberge, avec pour seule compagnie le petit livre de Pétrarque que lui a offert Lorenzo de Medici et la bible d’Andrea, il ne cesse d’interroger le mystère de la mort du moine, tout à son désir impétueux de capturer dans la pierre sa beauté terrestre.
Au fil des jours, le sculpteur arrogant et tourmenté, que rien ne doit détourner de son oeuvre, se laisse pourtant approcher : par ses compagnons les carriers, par la folie douce de Cavallino, mais aussi par Michele, un enfant de six ans dont la mère vient de mourir. La naïveté et l’affection du petit garçon feront resurgir les souvenirs les plus enfouis de Michelangelo.
Parce qu’enfin il s’abandonne à ses émotions, son séjour à Carrare, au coeur d’une nature exubérante, va marquer une transformation profonde dans son oeuvre. Il retrouvera désormais ceux qu’il a aimés dans la matière vive du marbre.

Biographie : Née en 1976, Léonor de Récondo vit à Paris. Violoniste baroque, elle se produit avec de nombreuses formations, et avec L’Yriade, ensemble de musique qu’elle a fondé en 2004. Elle a également enregistré des CD et des DVD. Rêves oubliés (Sabine Wespieser éditeur, janvier 2012), régulièrement réimprimé depuis sa parution, a révélé une romancière exigeante dont la phrase juste et précise conduit le lecteur au plus près de ses émotions.

Mon avis :

C’est l’histoire d’une quête, celle d’un grand artiste Michelangelo, plongé dans son passé malgré lui. Cette quête se nourrit des rencontres inattendues entre ce grand homme et des êtres différents : un moine d’une exceptionnelle beauté, un homme qui se prend pour un cheval et un petit garçon très intelligent.

Le grand homme Michelangelo se définit comme étant fait de pierre vive d’où le titre ‘pietra viva’. À trente ans, le passé le hante et l’obsède : comment était sa mère ? L’a-elle abandonné ? Il se remémore aussi son premier mécène Lorenzo De Medici et cherche à comprendre le cheminement de sa vie jusqu’à aujourd’hui . Grâce à ce séjour à Carrare et aux magnifiques rencontres qu’il y fera, sa vie reprendra un sens et la paix va revenir en lui. Les personnages sont beaux, vivants et émouvants : j’ai aimé Cavallino et sa folie, Guido et ses mystères et aussi le petit Michèle et sa naïveté d’enfant.

Une belle lecture : forte car riche en émotions et douce grâce à la tendresse qui émane de ses souvenirs. J’ai été conquise par l’écriture si fluide et si parfaite, une écriture en accord avec l’histoire.

La morale de cette histoire : un grand homme, aussi, a besoin des autres pour grandir.

Quel plaisir si ce beau roman était récompensé cet automne … À suivre …

La maison d’édition Sabine Wespeiser  publie peu et toujours des textes forts; plusieurs de mes auteurs préférés sont au catalogue : Michèle Lesbre, Claire Keegan et Duong Thu Huong. L’objet livre de cette collection est magnifique aussi avec sa qualité de papier et son format.

Merci Libfly avec La voix des Indés et l’éditeur Arlea pour cette découverte.

 

 

Notation :

Un jour par la forêt de Marie Sizun

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Quatrième de couverture
Avant de s’endormir, elle songe à ce qu’elle a découvert, aux poèmes, aux images. Et l’immense, l’étonnant bonheur d’exister envahit la petite.
Ce matin-là, Sabine, onze ans, fait l’école buissonnière. Que fuit-elle vraiment ? Est-ce la perspective d’un rendez-vous fixé entre sa mère, dont elle a honte, et son professeur de français, excédée par son attitude en classe, ou l’idée plus confuse qu’elle n’a pas sa place au lycée ?
Mais au cours de sa journée vagabonde, dans ce Paris qu’elle découvre, bien des choses vont changer.
Le hasard d’une rencontre lui révélera le trésor qu’elle porte en elle.
Avec Un jour par la forêt, son septième roman publié aux éditions Arléa, Marie Sizun nous offre le magnifique portrait d’une enfant solitaire, qui ne demande qu’à s’épanouir au monde.

 

Biographie : Marie Sizun est née en 1940. Elle a été enseignante de lettres classiques à Paris, en Allemagne ainsi qu’en Belgique. Elle a trois enfants et vit à Paris depuis 2001.

Mon avis

Un roman qui se lit d’une traite ou presque, j’ai beaucoup apprécié.

Ce récit met en scène une fillette esseulée, sans ami, sans père, partageant le quotidien d’une mère peu loquace et dont la petite a honte. Un matin, elle décide de ne pas se rendre au collège et part à la découverte de Paris. Ce Paris si proche de chez elle, qu’elle connait très peu puisqu’elle ne quitte jamais son quartier de Montreuil. Ce jour là tout va basculer : une journée particulière l’attend qui va bousculer sa vie.

 

Les personnages m’ont émue : d’abord la petite fille au coeur du roman mais aussi la mère terne, effacée qui porte un amour énorme à sa fille et sacrifie tout pour elle.

Les thèmes abordės sont ceux de la famille déchirée, de la place de l’enfance ainsi que de l’éducation et l’importance de la culture. Une grande sensibilité émane de ce texte écrit dans une belle langue, et traversé de beaucoup d’émotions. Tellement d’émotions que par moment mon coeur s’est serré en accompagnant la petite fille. Les références littéraires nombreuses concourent à notre plaisir.

Quelle belle histoire aussi ! 

Ce roman m’a fait penser au livre « les demeurées » de Jeanne Benameur, très beau texte aussi.

Quel plaisir de lecture, bravo pour ce roman.

Je suis vraiment très emballée par ce texte et je vais suivre cet auteure dorénavant.

A noter : Marie Sizun a reçu Le grand prix littéraire des lectrices de Elle en 2008 pour son roman « La femme de l’allemand .

Merci Libfly avec La voix des Indés et l’éditeur Arlea pour cette découverte.

Notation :